Le site "Trump Effect" revendique des investissements réalisés sous Biden
Le site officiel de campagne de Donald Trump, baptisé Trump Effect, recense fièrement des dizaines de projets économiques majeurs aux États-Unis, qu’il attribue à l’impact direct des politiques mises en place par l’ancien président. Pourtant, une enquête menée par l’agence Reuters révèle que nombre de ces investissements ont été décidés, voire lancés, bien avant son retour en politique, et souvent sous l’administration de Joe Biden.
Selon les déclarations publiques de Trump, ses initiatives économiques auraient déjà généré pas moins de 14 000 milliards de dollars d’investissements privés dans le pays – une somme colossale représentant environ la moitié du PIB annuel américain. Or, en analysant les données disponibles sur le site Trump Effect, les chiffres racontent une tout autre histoire : seulement 2 600 milliards de dollars y sont listés, et encore, près de la moitié de ce montant proviendrait de décisions prises sous Biden ou de dépenses déjà prévues par les entreprises concernées.
Des projets en marche avant Trump
Parmi les initiatives revendiquées par le site figurent des projets comme une usine de LEGO en Virginie, un centre de production de semi-conducteurs en Arizona ou encore une usine de chocolat en Virginie. Cependant, selon Reuters, plusieurs de ces investissements étaient déjà en préparation bien avant que Trump ne revienne sur le devant de la scène.
Dans certains cas, les entreprises avaient même commencé à négocier des aides financières au niveau local ou étatique depuis des années. Par exemple, le fabricant de chocolat Clasen Quality Chocolate avait reçu des subventions de l’État de Virginie avant que Trump ne soit en poste. De même, la société LEGO collaborait avec les autorités locales dès 2022, trois ans avant l’installation de Trump à la Maison Blanche.
Des mesures Biden détournées ?
L’enquête de Reuters souligne également que certains des projets mis en avant sur le site Trump Effect ont été rendus possibles grâce à des lois adoptées sous l'administration Biden, comme le CHIPS and Science Act, qui encourage la relocalisation de la production technologique aux États-Unis. Ce cadre législatif a notamment soutenu l’investissement de Corning dans le Michigan, que Trump revendique pourtant comme un succès personnel.
De leur côté, les entreprises concernées, interrogées par Reuters, ont rarement confirmé un rôle déterminant de Trump dans leurs décisions d’investissement. Plusieurs d’entre elles n’ont d’ailleurs pas répondu aux demandes de commentaires.
Une stratégie politique bien rodée
Pour justifier ces revendications, la Maison Blanche de Trump avance que c’est bien sous son impulsion que les annonces d’investissement ont été rendues publiques. Kush Desai, porte-parole de l’ancien président, affirme que « Donald Trump est le meilleur négociateur de l’histoire moderne » et que ses politiques ont transformé des discussions théoriques en engagements concrets.
Mais les analystes économiques, comme Mark Zandi de Moody’s Analytics, se montrent sceptiques. Selon lui, les données économiques disponibles ne montrent pas de hausse significative des investissements, malgré les annonces répétées de Trump. Au contraire, les incertitudes créées par ses politiques commerciales, notamment ses menaces de droits de douane, pourraient avoir freiné certaines décisions d’entreprise.
Entre communication et réalité économique
Dans plusieurs cas, des dépenses d’entreprise routinières ont été reconditionnées en « nouveaux investissements » pour les besoins du récit politique. Apple, par exemple, a annoncé 500 milliards de dollars de dépenses en cinq ans pour soutenir l’intelligence artificielle, ce que Trump a salué comme une marque de confiance. Pourtant, ces montants correspondent aux rythmes habituels de dépenses de l’entreprise, selon plusieurs analystes financiers.
Même constat pour Eli Lilly, géant pharmaceutique qui a promis 27 milliards de dollars d’investissements. Si cette annonce a été présentée comme une victoire de Trump, elle n’était en réalité qu’une légère augmentation par rapport aux dépenses engagées depuis 2020. Et l’entreprise ne s’est pas prononcée sur un éventuel rôle de l’ancien président dans cette décision.
Des promesses XXL, peu de preuves
La liste publiée par le site Trump Effect inclut aussi des projets de sociétés étrangères, comme Hyundai, Saint-Gobain ou Diageo. Là encore, les documents consultés par Reuters montrent que ces entreprises avaient engagé des négociations avec les États bien avant que Trump ne soit au pouvoir.
Enfin, le projet « Stargate », qui prévoit la construction d’infrastructures d’intelligence artificielle à hauteur de 500 milliards de dollars par OpenAI, Oracle et SoftBank, est toujours en phase de négociation avec plusieurs États américains. Annoncé lors de la première journée complète de Trump à la présidence, le projet n’a pas encore abouti.
Conclusion
À l’approche de l’élection présidentielle, Donald Trump mise sur une image de président bâtisseur et moteur de croissance économique. Mais une lecture attentive des faits montre que de nombreuses annonces revendiquées par son équipe s’appuient en réalité sur des décisions prises par d’autres ou sur des plans d’investissement en gestation depuis longtemps.
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